Toc toc. Qui est là?
“Pourquoi il va si vite?”
“C'est demain la date limite pour les putains de photos scolaires?”
On a tous un narrateur intérieur. Cette petite voix en écho ne se contente pas de soulever les détails pertinents d'un quotidien qui déborde de partout : elle juge allègrement.
Ses murmures incessants prennent racine dans tout ce que vous faites. Ils s'imposent, sans élection, comme représentants de la “to Do list” et de ce que les spécialistes avec des gros diplômes appellent aujourd'hui : La charge mentale.
Imaginons la charge mentale comme le phénomène intrusif des colporteurs. Exactement! Les représentants de l'église X-Y-Z, les vendeurs de thermopompes, les anciens détenus qui te revendent ton ancien portefeuille : bref, ceux qui arrivent sans prévenir avec quelque chose dont tu n'as pas besoin. Qui ose dire non à une paire de pantoufles en Phentex crochetées à la main par une grand-mère insistante? Personne!
Comme pour le Phentex, il y a des domaines où la charge mentale n'a pas sa place : la
sexualité. Après tout, un rapport sexuel dépend d'une connexion plus “Deep” que le Wi-Fi.
Si quelque chose vous tracasse et bloque le passage au désir, ça va donner du “Gandalf style” : “Vous ne passerez pas!”
Autrement dit, même avec un beau spécimen, nu, dans ton lit, si ton cerveau est en train de faire la liste d'épicerie, il y a de fortes chances que Cupidon s’endorme avant toi!
Je travaille avec des couples en difficulté depuis bientôt 15 ans. Ils viennent me voir en pensant souvent que leur libido s'est expatriée. Ils ne comprennent pas pourquoi les trucs habituels pour raviver la flamme ne fonctionnent pas sur eux, persuadés qu'ils se dirigent vers la séparation.
Ce que beaucoup ignorent c'est qu’un simple recalibrage des tâches reliées à la gestion familiale et domestique est parfois suffisant pour ramener le mariage sur les rails et éviter une catastrophe.
Près de 40 % des couples en consultation sexologique mentionnent la fatigue mentale comme obstacle principal à leur désir. Selon une étude de l’Ifop (2023), 68 % des femmes disent avoir du mal à “déconnecter mentalement” pour se laisser aller au plaisir.
Aujourd'hui on s'attarde donc à ces colporteurs de malheurs. On essaie de les contourner, on apprend à leur claquer la porte au visage et on s'enferme à double tour dans le but de protéger l'amour!
La charge mentale, ce hamster invisible
Le concept de charge mentale a été popularisé en 2017 par la dessinatrice française Emma, grâce à sa bande dessinée virale intitulée “Fallait demander”. Dans cette BD, Emma illustre avec humour et lucidité le poids invisible de la gestion du quotidien. Je vous en recommande la lecture. C'est franchement rafraîchissant!
Parlant rafraîchissement : la charge mentale c'est comme un déneigeur du Québec en février, ça arrive à 3hr AM puis ça ramasse toute la marde pour la replacer en petits tas propres un peu partout sur ton terrain. Ça ne sert à rien. Sinon à ne pas perdre le contrôle sur un surplus de neige ou de données que ton cerveau n'arrive plus à gérer.
La charge mentale ne désigne pas une tâche mais le travail invisible de planification, d’organisation et d’anticipation du quotidien du couple et des familles :
👉 Ce n'est pas seulement l’acte de faire le ménage mais de penser à quand ça pourra être fait. Reste-t-il du produit ménager?
👉 Ce n'est pas seulement le travail de cuisiner un repas mais de choisir les ingrédients et de planifier les différents temps de cuisson.
C'est aussi : penser aux cadeaux de profs pour Noël, trouver les pyjamas qui “matchent” pour le calendrier annuel, compléter les inscriptions au soccer, renouveler la carte d'assurance maladie, amener Pablo chez le vétérinaire, prendre un deuxième hypothèque pour payer le vétérinaire de Pablo, magasiner les assurances, etc. Essoufflé?
La charge mentale, c’est un peu comme une application qui tourne en arrière-plan dans ton cerveau, qui ne sert pas à grand-chose et qui vide ta batterie.
L'organisation familiale, l'éducation des enfants, les tâches ménagères et la planification budgétaire sont les 4 coins de ce que j'appelle : le carré noir.
Il s'agit d'une boîte sombre, pleine de conflits aux angles pointus dans laquelle se perdent les couples modernes. Pourtant, ça n'a pas toujours été le cas. Ces 4 points étaient, à l'époque de nos grands-mères, réservés aux femmes.
Aujourd’hui, les femmes travaillent autant que les hommes (au Canada, 82 % d’entre
elles ont un emploi à temps plein ou partiel). Mais elles continuent à assumer 70 % des tâches domestiques et de gestion familiale.
Donc, même si on prône l’égalité, que la charge mentale s’est modernisée, rien ne s'est réparti équitablement. Ça constitue en soi une des plus grosses injustices actuelles pour les femmes. Une injustice noire, poilue et féroce qui se donne maintenant tous les droits, y compris celui de hanter les draps.
Chantale est une terroriste!
La charge mentale rime avec Chantale. Elle porte des talons hauts et se plaint que ça lui fait mal aux pieds, comme nous toutes.
La charge mentale, c'est une expression majoritairement féminine. Oui. Mais… pas exclusivement!
Les études ont démontré de façon assez évidente que les femmes ressentent plus fortement les vagues du tsunami Chantale quand on parle du foyer et de la gestion des émotions. Messieurs se permettent ici un sourire en coin. “Évidemment, vous êtes bien trop émotives!”
Les hommes ressentent davantage de pression pour des choses plus… superficielles : la performance financière et sexuelle. C'est donc là où la femme se permet un rictus : “C'est prouvé… Les hommes pensent avec leur queue!”
Mais qu'en est-il des couples homosexuels? Étonnamment, ils reproduisent souvent les mêmes déséquilibres, mais selon d’autrescritères qui n'ont rien à voir avec la hauteur des talons cette fois. Par exemple, celui qui “gère mieux” prend naturellement le poids de la charge mentale.
Au final c’est une dynamique relationnelle, plus qu’un gène féminin.
Elle se niche souvent dans les inégalités du couple et comme un terroriste elle place des bombes à retardement dans les endroits les plus sacrés de votre vie intime.
Explication scientifique
Vous l'ignorez certainement (un gros “High five” au gouvernement québécois qui a pensé pertinent de retirer les cours d'enseignement à la sexualité pendant vingt ans) mais… :
Le désir sexuel nécessite un espace mental libre, une certaine “disponibilité psychique” pour avoir lieu.
L’excitation sexuelle implique l’activation du système de récompense (dopamine) et la
désactivation du cortex préfrontal, la zone responsable du raisonnement et du contrôle.
Le problème, c'est que la charge mentale maintient le cortex en hyperactivité permanente. Le pauvre cerveau reste en
“mode gestion” et ne passe jamais en “mode plaisir”.
C’est difficile de faire l’amour quand ton cerveau roule un PowerPoint sur
les lunchs du lendemain. “Jambon ou dinde?” “Romaine ou roquette?” “Le fromage est-il encore bon?” “Je l'ai acheté quand donc?”
Ça amène :
👉 Stress chronique
👉 Fatigue cognitive
👉 Hormones de stress (cortisol)
Tous ces facteurs assassinent la libido à coup de hache! Et c'est souvent avec beaucoup de retard que les couples s'en rendent compte et finissent par prendre rendez-vous. Elles me disent, en pleurant :
“Je ne dis pas non, mais je n’ai juste pas d’espace pour dire oui.”
“Je me sens coupable de ne pas vouloir, alors je me force.”
Ben voilà! Inutile de chercher plus loin. Elle est là, la solution, non? Elle n'a qu'à faire un effort, comme l'homme fait aussi l'effort d'une virée chez Ikea pour acheter SVÖRTGHEN, deux tiroirs, sans boulettes… de temps en temps.
Devoir conjugal
C'est une question légitime : pourquoi ne pas fermer les yeux et attendre que ça passe? Après tout, il y a pire que de “subir” l'amour avec celui qu'on aime?!
Parfois vous avez certainement l'impression que c'est une corvée pour elle. Et c'est vrai. Au mauvais moment, bien épuisée, même une visite à Disneyworld peut donner envie de passer son tour!
Si nos grands-mères avaient la bible pour les convaincre du très archaïque concept du “devoir conjugal”, les femmes d'aujourd'hui vivent avec la notion du “sexe empathique”.
Le sexe empathique, c'est l'idée même de se forcer à des ébats amoureux, sans en avoir totalement, 100 % envie. C'est de ne pas être disposé à offrir du plaisir parce qu'on est déjà vide à l'intérieur. Et si ce concept fait du sens de temps en temps, il vient aussi avec des conséquences importantes dont le ressentiment et la colère.
Il faut donc absolument démystifier cette idée : se forcer n’aide pas, ça crée de la déconnexion émotionnelle. Éventuellement elle vous reprochera toute pression, aussi “douce” soit-elle.
Puis un jour, les moments vécus sous la couette qui devaient être synonymes de connexion et d'amour deviennent violence symbolique et séparation.
Les études montrent, hors de tout doute, que plus une personne se sent contrainte, plus le désir s’éteint durablement. En 2021, une enquête canadienne révélait que 52 % des femmes se sont déjà “forcées” par peur de décevoir leur partenaire.
Ajoutons à cela le fait que la femme lubrifie via l'excitation qu'elle ressent, dans le laisser aller et la confiance. Sans réelle disponibilité, la lubrification ne se fait pas et cela entraîne une pénétration douloureuse qui ajoute de l'amertume au sexe par “gavage”.
Et même quand le corps fait sa job, l’esprit peut freiner : l’orgasme, c’est le lâcher-prise ultime. Si le cerveau reste en mode gestion, le corps reste en mode vigilance. Résultat : pas d’explosion, juste un petit feu de Bengale intérieur. Piouuuuu…
Le rapport sexuel devient une tâche de plus à cocher. Et ça vient avec le même enthousiasme que les autres tâches équivalentes sur la liste : laver les chiottes, vider le garage, ranger le sapin de Noël… alors qu'on est en avril!
Et mesdames, messieurs, c'est ainsi que la charge sexuelle, Chantale de son p'tit nom d'amour, s'installe dans notre lit pour y foutre le bordel.
Renverser la vapeur
Évidemment que la liste des effets secondaires est aussi longue que les nuits blanches que la charge mentale cause. Et ce, pour les deux partenaires :
👉 Baisse de libido
👉 Irritabilité
👉 Disputes récurrentes sur la fréquence des rapports sexuels
👉 Sentiment d’injustice
Je suis bien placée pour savoir que dans bien des cas, Chantale pousse à la rupture ou, presque pire, au détachement affectif.
Dans 1 couple sur 3, le déséquilibre des tâches et la fatigue mentale sont évoqués comme l’un des principaux facteurs de désintérêt sexuel (Ifop, 2023).
Je vois l'incompréhension dans les deux paires d' yeux. Lui ne reconnaît pas sa femme qui le repousse comme si ses besoins n'avaient aucune valeur. Elle ne se reconnaît plus elle-même et surtout est incapable de mettre des mots sur son tourment. Pourtant il suffit de quelques ajustements : on ne parle pas de remplacer le moteur au complet mais de faire un entretien plus serré!
Le problème c'est que le couple d'aujourd'hui consulte quand la voiture de l'amour dont il dépend est déjà brisée. Le moteur a déjà donné son 4 % et elle va finir sur Kijiji le temps de crier : on fait quoi maintenant?
Quand ils viennent me voir, c’est souvent que la tendresse a déjà pris le bord et c' est le gros problème en soi. On ne mettra aucun effort dans une relation dont les repères affectifs sont tombés comme un château de cartes. Ainsi, beaucoup de couples entrent en thérapie pour obtenir une “certification” d'avoir essayé, une “permission” verbale que c'est ok de passer à autre chose. Car sans le savoir, la grande majorité ont déjà tourné la page.
Il faut impérativement vous donner une chance et consulter alors que vous êtes encore bien soudés mais remarquez un essoufflement.
Prévention
Mais Mlle V… quelle est la plus grosse cloche qui sonne le besoin de consulter? Que ce soit dû à la charge mentale ou à d'autres irritants?
La répétition est probablement un des plus grands indicateurs qu'on a besoin d'un médiateur, d'un thérapeute, de quelqu’un de neutre capable de nous aider à naviguer en eaux troubles.
Si vous devez avoir continuellement les mêmes conversations, sans régler le problème partiellement ou complètement c'est que l'aide est déjà nécessaire.
La thérapie de couple ne sauve pas les couples, elle les prépare à affronter une tempête.
👉 Apprendre à communiquer sans accuser.
👉 Identifier les rôles implicites.
👉 Réintroduire du plaisir partagé sans pression
Il en est de même pour la thérapie individuelle. Votre partenaire ne veut pas investir dans la relation? Investissez dans vous-même! Cela va vous permettre de :
👉 Mettre un mot sur vos soucis.
👉 Reconnaître vos limites personnelles.
👉 Apprendre à déléguer parce que parfois ce n'est pas le partenaire qui en fait moins mais l'autre, qui l'en empêche.
👉 Apprendre à exprimer vos besoins
Le plan : Moins de “to-do”, plus de “ta-do”
Le côté positif avec la charge mentale c'est qu'une fois comprise et reconnue comme problématique, ça se règle assez facilement. On trouvera ensemble le moyen de :
1️-Partager la gestion invisible
● Il faut faire un inventaire des tâches mentales : qui pense à quoi. On les met sur papier et avec deux marqueurs de couleur
● Introduire la co-responsabilité (“penser à deux” au lieu de “faire à deux”). Ainsi, une autre couleur peut représenter ce que les deux on en tête au quotidien.
● On redistribue et pas forcément en fonction des forces de chacun. Car on arrivera au même problème : il y en aura plus dans la cour de celui qui est le meilleur en “gestion”.
2️-Créer de la “disponibilité mentale”
● Instaurer des moments “off” sans logistique : 30 min par jour sans écrans, sans planification.
● S'offrir une sortie par semaine en couple ou on décroche complètement, sans enfants
3️-Redéfinir l’intimité
● Pratiquer la pleine conscience sexuelle (focaliser sur les sensations, la lenteur, le contact, la connexion).
● Limiter, voire interdire, la pénétration : l'intimité, ça ne se limite pas au va-et-vient, c'est surtout des massages, des câlins et des rituels de partage.
Si votre partenaire épuisé sait que la pénétration n'est pas sur le tapis, il sera moins enclin à dire non et il y aura connexion autrement. Et c'est quand on se l'interdit que ça devient soudainement intéressant!
L'objectif de ce très efficace exercice est simple : reconnecter émotionnellement avant de reconnecter sexuellement.
4️-Déléguer ou simplifier
● Externaliser certaines tâches (commandes en ligne, aide ménagère si possible, aide aux pairs pour les enfants).
● Prendre des vacances régulièrement pour éviter de donner toute la place au travail.
● Se rappeler que le couple n’est pas une entreprise de performance mais un unité d'amour basé sur des fondations solides sont vous êtes les maçons.
Parfois le danger porte d'autres prénoms : Sophie, Robert, Roseline ou Jean. Car les partenaires moins patients sont daltoniens : l'herbe est toujours plus verte chez le voisin!
L'infidélité est souvent la conséquence ultime de ce manque de connexion sexuelle. Et pourtant, vous avez tant d'amour à donner!
Gardez en tête ceci mes amis : la charge mentale n'est pas une maladie du désir, c'est simplement un excès de sollicitation mentale.
Si je place une perle dans une boîte pleine de sable, de cailloux, de morceaux de plastique et de débris, on mettra du temps à trouver la perle et ce, même si on cherche avec amour.
Parfois, l'amour ne suffit pas. Tant qu’on ne fera pas de la place dans la tête, le corps ne suivra pas et le grand Ô brillera par son absence.
Main dans la main
La bonne nouvelle c'est que l'équipe des boutiques érotiques au 7ième Ciel et moi-même, sommes plus que qualifiés pour vous tenir par la main.
C'est ce à quoi servent les éducateurs sexuels, sexologues, thérapeutes, travailleurs sociaux et autres. Les éviter c'est le “suicide” de votre couple.
Alors, si vous aussi, vous avez remisé libido et lingerie, faute d'espace mental, ressortez-les des boules à mites en visitant d'abord le www.mllev.com.
Donnez-vous comme nouveau défi : la réforme amoureuse! Parce qu’avec toutes les nouvelles connaissances que vous y aurez acquises, ce n'est pas qu’une simple vie sexuelle que vous allez retrouver mais tout un monde dont vous ne soupçonniez même pas l'existence.
Un monde où Chantale ainsi que tout autre prénom différent du VOTRE…n'existe pas. Alléluia!
MLLE V – Conseillère en Sexologie
www.mllev.com

